Communiqué de presse | Menaces sur la science et la recherche scientifique, retrait de l’aide américaine à des organisations internationales
Actualités
Depuis son investiture le 20 janvier dernier, Donald Trump a pris une série de décisions qui vont impacter très fortement et négativement la recherche scientifique aux États-Unis, ce qui aura des conséquences dans le monde entier, notamment à travers les collaborations internationales qui sont aussi ciblées. Des coupes budgétaires au niveau fédéral ont été annoncées, des licenciements de chercheurs, de fonctionnaires et la suppression de programmes clefs. L’administration de Donald Trump et Elon Musk, son collaborateur chargé de l’Efficacité gouvernementale, qui échappe au contrôle du Sénat car il n’est pas membre du gouvernement fédéral, a décidé de couper drastiquement les fonds d’aide humanitaire de USAID. Cette dernière agence de développement, qui représente 42% de l’aide humanitaire dans le monde, a vu ses fonds soudain gelés, et la désorganisation touche plus d’une centaine de pays, où les diverses ONG sont en très grande difficulté

©AdobeStock_Amir Bajric
Les États-Unis menacent également de quitter l’Organisation mondiale de la santé (OMS) des Nations unies (ONU) et coupent brutalement les crédits des National Institutes of Health (NIH), l’agence nationale de la recherche médicale, tandis que le complotisme et les théories anti-vaccins se répandent au plus haut niveau de l’État fédéral, alimentant les inquiétudes. L’accès universel aux soins est remis en cause, la désinformation médicale se répand dans les réseaux sociaux. Le financement des universités va lui aussi être dramatiquement diminué, par la baisse de l’autorisation de leurs prélèvements sur les montants des contrats de recherche de leurs scientifiques auprès des agences fédérales, désormais plafonnés à 15%, au lieu de 60% antérieurement. L’effondrement de ces outils, essentiels au financement des universités, va affaiblir durablement toute la recherche publique des États-Unis.
Donald Trump a décidé de censurer toutes les recherches et les actions liées au changement climatique. Les États-Unis sont à nouveau sortis de l’accord de Paris, rédigé lors de la COP21, conférence qui avait permis d’aboutir à un accord international sur le climat. Parmi ses premières décisions, Donald Trump a supprimé le programme de la NASA, destiné à la surveillance de la Terre, qui diagnostiquait les gaz à effet de serre, mais aussi la pollution touchant la santé des populations, interrompant la continuité des observations, et impactant négativement tous les pays associés. Toute interruption ruine l’utilité de ces séries temporelles et spatiales, et si d’autres pays ont des programmes similaires, la complémentarité avec les satellites des États-Unis est capitale et doit être soutenue. Donald Trump s’est attaqué à l’USDA, l’agence fédérale en charge de l’agriculture, en lui interdisant de poursuivre des travaux sur le réchauffement climatique. Il a ainsi fait supprimer des sites fédéraux au moins 8 000 pages web mentionnant des sujets désormais interdits, touchant au changement climatique, à l’environnement, à la biodiversité, aux études de genre. Il a aussi démantelé au niveau fédéral le plan de réformes écologiques et sociales pour la protection de l’environnement, le développement des énergies propres et renouvelables, et au contraire annonce son soutien renforcé au développement de l’industrie des énergies fossiles.
Au prétexte de lutter contre l’idéologie « woke », et de défendre les valeurs traditionnelles, l’administration Trump s’attaque aux politiques de DEI (diversité, équité, inclusion) qui visent à encourager la progression sociale des minorités défavorisées. Toute discrimination positive est désormais interdite : ceci s’applique tout aussi bien aux étudiants étrangers aux États-Unis qu’aux femmes et aux minorités dans les entreprises, les universités et les institutions académiques.
L’Académie des sciences est très préoccupée par ces coupures budgétaires, le licenciement brutal des personnels de recherche les plus précaires, les étudiants en thèse et les post-doctorants. Des années de formation et de recherche sont soudain perdues, les travaux interrompus, et les collaborations internationales sacrifiées. La recherche scientifique est aujourd’hui mondialisée, et tous les pays vont subir l’impact de ces décisions. De surcroît, l’obscurantisme qui règne, la négation de la réalité par l’usage débridé de la désinformation montrent combien l’autorité de la parole scientifique est menacée auprès des décideurs politiques, de même que la place de la raison dans le débat public. La censure exercée aujourd’hui va réduire la liberté de recherche dans les secteurs les plus porteurs et priver les processus de décisions individuelles et collectives de l’éclairage des recherches scientifiques et des rapports d’organismes spécialisés comme le GIEC. L’impact sur les générations futures, sur la biodiversité et la santé de la planète va se révéler catastrophique. Les dégâts causés en si peu de temps seront beaucoup plus longs à réparer.
L’Académie des sciences exprime sa solidarité avec le monde scientifique des États-Unis en cette période chaotique. Elle invite les chercheurs de notre pays à rechercher activement les moyens de maintenir les collaborations scientifiques qui sont en cours. Nous restons très attentifs à l’évolution de la situation qui pourrait avoir des conséquences ultérieurement dramatiques pour la recherche mondiale et la compréhension de la science par le public. L’Académie des sciences s’efforcera de contribuer à toutes mesures permettant à nos collègues des États-Unis de poursuivre la recherche splendide qu’ils ont effectuée jusqu’à ce jour, pour le bien de leur pays et de l’humanité.
English version : Read the press release